By Patrick Evenden, EMEA Staff Writer
Le constructeur de moteurs d'avion Rolls-Royce poursuit sa transition vers la neutralité carbone. Nous avons récemment discuté avec Alex Kyte, Global Head of Talent chez Rolls-Royce, afin de découvrir comment l'entreprise adopte une toute nouvelle approche du développement collaborateur et se construit un avenir basé sur les compétences.
Cet article a été initialement publié sur le blog de Workday le 21 septembre 2022.
Rolls-Royce est évidemment un nom dont la plupart de nos lecteurs ont entendu parler, mais pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la façon dont l'entreprise s'est diversifiée au cours des dernières décennies ?
Vous avez probablement entendu parler de Rolls-Royce pour ses voitures de luxe. Mais nous ne produisons plus d'automobiles. Nous sommes aujourd'hui une entreprise de technologie industrielle spécialisée dans les groupes de puissance pour l'aérospatiale, la défense, les générateurs et le nucléaire. Si vous regardez par le hublot lors d'un vol long-courrier, vous avez une chance sur deux de voir le logo Rolls-Royce sur les moteurs de l'avion. Nos nouvelles activités s'inscrivent en grande partie dans la transition vers le zéro émission nette. Nous investissons dans le vol électrique et nous avons récemment dévoilé l'avion entièrement électrique le plus rapide au monde. Nous investissons également dans de petits réacteurs nucléaires modulaires comme alternative à l'énergie fossile pour les logements et l'industrie. Nous sommes donc au cœur d'une période de transition.
Ce type de changement nécessite une nouvelle approche de la gestion des talents et du sourcing des compétences. Pouvez-vous nous en dire plus sur la manière dont vous avez abordé ce parcours ?
Nous sommes passés à Workday Skills Cloud autour de 2020, mais nous avons commencé ce parcours un peu plus tôt. Nous sommes une entreprise spécialisée en énergie industrielle. Nos collaborateurs avaient un haut niveau de spécialisation et restaient donc longtemps à un même poste ou dans le même secteur d'activité de l'entreprise. Au fil des années, il est ressorti de nos enquêtes d'engagement collaborateur que nos salariés avaient le sentiment que leurs possibilités d'évolution de carrière au sein de Rolls-Royce étaient très cloisonnées. Par exemple, une personne fraîchement diplômée en ingénierie mécanique ne se voyait proposer que des formations et des postes en ingénierie mécanique et restait dans le secteur de l'ingénierie mécanique pendant toute sa carrière.
Les salariés voulaient plus de transparence et étaient ouverts à l'idée d'élargir leurs horizons professionnels, mais ils avaient le sentiment que tout se passait derrière des portes closes. Nous voulions tendre vers un « développement agile » où les collaborateurs et managers pourraient accéder à toutes les formes d'opportunités de développement qui existaient dans notre entreprise, sans avoir à attendre qu'elles leur soient proposées. Et cela concernait tous les sujets, du suivi de microformations à la participation à des missions et projets. Il était question de programmes de mentorat, d'offres d'emploi, de tout ce qui nous venait à l'esprit.
Au départ, nous ne pensions pas vraiment aux compétences. Nous pensions à l'intérêt pour nos équipes. Nous avions déjà essayé de demander aux collaborateurs de remplir des profils de compétences, mais très peu l'ont fait, par manque de motivation. Nous avons adopté Talent Marketplace en même temps que Workday Skills Cloud afin de pouvoir mobiliser nos collaborateurs en leur disant que le meilleur moyen de profiter de toutes ces opportunités formidables était de renseigner leurs compétences.
« Les résultats ont été étonnants : 60 % des personnes ont créé un profil Workday Skills Cloud et se sont mis à chercher une mission. Une dizaine de personnes ont réalisé une mission dans les deux premiers mois du projet pilote. Et près d'un tiers de nos responsables ont organisé une mission. »
Alex Kyte, Global Head of Talent, Rolls-Royce
De nombreuses entreprises alignent naturellement les compétences sur les aptitudes. Pouvez-vous nous raconter de quelle manière vous avez introduit une approche basée sur les compétences ?
Nous étions très sceptiques au début. Les collaborateurs aimaient faire ce qu'ils faisaient et ne pensaient pas que cette histoire d'approche basée sur les compétences allait vraiment s'imposer. Nous avons discuté avec de nombreuses entreprises qui nous ont parlé de leurs parcours respectifs. Et elles nous ont suggéré de faire un essai à très petite échelle.
Nous avons choisi de travailler avec la fonction Ingénierie, qui est la plus importante de notre entreprise et qui avait besoin d'élargir le rôle de ses ingénieurs pour s'adapter à l'évolution de la technologie que nous souhaitions développer dans le cadre de notre transition vers la neutralité carbone. Nous avons collaboré avec eux à un niveau hiérarchique très élevé et avons sélectionné environ 500 personnes dans l'une de nos divisions d'ingénierie aérospatiale pour faire un essai.
Nous avons commencé par conseiller aux responsables de créer une mission ponctuelle. Nous leur avons donné quelques semaines pour rentrer les informations dans le Talent Marketplace. Nous avons ensuite conseillé aux collaborateurs de renseigner leurs compétences pour trouver une nouvelle opportunité.
Les résultats ont été étonnants : 60 % des collaborateurs ont créé un profil Workday Skills Cloud et se sont mis à chercher une mission. Une dizaine de personnes ont débuté une mission dans les deux premiers mois du projet pilote. Et près d'un tiers de nos responsables ont proposé une mission. Les retours sur l'expérience utilisateur ont également été très positifs. Ce projet pilote a donc été une réussite.
Suite au succès du projet pilote, comment avez-vous déployé plus largement cette approche ?
Plutôt que de dire à tout le monde que nous allions désormais passer à Workday Skills Cloud et au système de missions (ce qui est l'approche traditionnelle de la conduite du changement), nous voulions répondre à la demande, car la mise en œuvre nécessitait un investissement de la part des leaders pour vouloir changer la façon dont ils gèrent le développement de leurs équipes. Des personnes travaillant dans d'autres services de l'ingénierie ont commencé à dire qu'elles avaient entendu parler du projet pilote, des missions, des compétences, et ont exprimé leur souhait de participer au projet. Nous étions ravis de leur engouement et leur avons donc montré comment mettre en œuvre tout ce que nous avions appris lors du projet pilote.
Nous avons terminé en février notre premier déploiement qui concernait 4 000 personnes et nous en sommes aujourd'hui à 10 000 personnes. Nous avons effectué plusieurs lancements. Presque toutes les deux semaines, nous passons à un nouveau service, qu'il s'agisse d'une autre partie de l'ingénierie ou des équipes du développement commercial, de la communication ou des RH. Parmi toutes les populations intégrées au projet, il y a près de 40 % d'adoption. Cela signifie que 40 % des collaborateurs dans ces secteurs remplissent des profils Workday Skills Cloud, cherchent des missions et consultent les opportunités. Cela génère de nombreuses données sur les compétences que nous pourrons ensuite utiliser pour avoir une vision globale des compétences de nos collaborateurs, et pas seulement de leurs qualifications ou des emplois qu'ils ont occupés auparavant.
Nous sommes vraiment satisfaits des résultats obtenus jusqu'à présent. Nous aimerions que la moitié de l'entreprise utilise Workday Skills Cloud d'ici la fin de l'année, et ce, uniquement sur la base du bouche-à-oreille.
« Nous avons eu 1 000 heures soudainement sorties de nulle part pour réaliser ces projets, sans demandes d'heures supplémentaires ni personnes qui restaient tard. En fait, les collaborateurs ont accompli leur travail quotidien plus rapidement afin de trouver du temps pour faire les choses qui leur tenaient à cœur. »
Comment avez-vous surmonté les réticences internes et quels processus avez-vous mis en place pour soutenir le programme ?
En tant que société d'ingénierie, nous aimons les règles. Nous aimons que tout soit mis par écrit. Nous aimons les choses claires. Nous n'aimons pas les à-peu-près. Ce qui peut être compliqué à gérer. Nous avons donc adopté l'attitude inverse. Nous nous sommes dit que nous n'allions pas établir de règles et que cela allait être simple et agile, que nous n'allions pas mettre en place des approbations qui obligeraient les collaborateurs à demander la permission avant de proposer ou d'accepter une mission. Au lieu de cela, nous avons dit aux leaders : « Si votre mission est intéressante, les collaborateurs répondront présents. Si elle ne l'est pas, ils ne seront pas au rendez-vous. Vous devez impérativement être attractifs en proposant un travail réellement intéressant et en utilisant les compétences pour attirer des candidats potentiels. »
Nous avons donné quelques conseils pour créer des missions attrayantes. Nous constatons que l'intérêt se porte à 80 % sur des travaux à court terme, de petite taille et de moins de cinq heures. Généralement, plus vous ajoutez de compétences, plus vous suscitez d'intérêt. Si vous ajoutez des vidéos pour illustrer votre propos, c'est encore mieux. Nous encourageons l'adoption par le biais des communications, mais en tant que système, nous essayons de ne mettre en place aucune règle.
En fin de compte, vous lancez une nouvelle conversation dans le Talent Marketplace et le reste se met en place tout seul. Le collaborateur, son responsable et l'hôte de la mission discutent ensuite ensemble. Ils peuvent par exemple se dire : « Hé, devinez quoi ? Cette semaine, Heinz ne peut pas faire toutes les heures souhaitées, mais il peut en faire deux fois plus la semaine prochaine pour compenser. »
Durant la phase pilote, nous avons effectivement constaté une augmentation des efforts discrétionnaires. Nous avons eu 1 000 heures soudainement sorties de nulle part pour réaliser ces projets, sans demandes d'heures supplémentaires ni personnes qui restaient tard. En fait, les collaborateurs ont accompli leur travail quotidien plus rapidement afin de trouver du temps pour faire les choses qui leur tenaient à cœur.
Quelle est la prochaine étape pour Rolls-Royce ?
Nous allons continuer d'étendre l'adoption de Workday Skills Cloud. Nous étudions la façon dont nous pouvons le relier à la formation et au mentorat en associant un mentor en fonction des compétences, pour un lancement cet été. Mais la prochaine étape vraiment passionnante pour nous est notre projet d'organisations basées sur les compétences. Il s'agit d'examiner les emplois et de voir si nous pouvons les décomposer en petites tâches, et de voir si nous pouvons employer un vivier de personnes qualifiées et leur permettre de se déplacer dans l'entreprise en fonction des petites tâches qu'elles effectuent. Cela va complètement bouleverser l'ensemble de nos pratiques RH traditionnelles, y compris la performance et la récompense. Comment récompenser les collaborateurs ? Comment savoir quel est leur taux pour les compétences qu'ils possèdent ? Comment évaluer leur performance lorsqu'ils ont un seul responsable ? Comment appliquer ensuite les solutions de formation ? Comment appliquer tous les éléments qui seront affectés par ce fonctionnement ? C'est vraiment la prochaine étape de notre parcours.